Réseaux sociaux et adolescents : reconnaître le passage de l’usage à l’usage problématique
Par Thinhinane Ould Younes, M. ps.éd · 17 septembre 2025 · Montréal
Les réseaux sociaux font partie de la vie des adolescents. Comme l’indique l’American Psychological Association (2023), l’utilisation des réseaux sociaux peut avoir des effets à la fois positifs et négatifs sur le développement psychosocial des adolescents. L’enjeu n’est pas d’interdire, mais de préserver l’équilibre entre vie numérique et besoins essentiels : sommeil, école, relations, activité physique, et estime de soi. Voici des repères simples pour différencier un usage sain d’un usage problématique, des stratégies concrètes, et quand consulter.
Sommaire
- Usage sain vs usage problématique
- 10 signaux d’alerte à surveiller
- Auto-évaluation rapide (ado & parent)
- Stratégies familiales pour rééquilibrer
- Différencier “usage problématique” et “dépendance”
- Plan d’action familial en 4 semaines
- Comment la psychoéducation peut aider
- Quand consulter ? Et quoi faire en urgence
- Ressources et services connexes
- Références
Usage sain vs usage problématique
Usage sain : l’adolescent reste engagé à l’école et dans ses activités hors ligne, dort suffisamment, entretient des relations variées et peut se déconnecter sans détresse notable.
Usage problématique : perte de contrôle, préoccupation constante, besoin d’y retourner, pertes de temps importantes, impact négatif sur le sommeil, l’humeur, les résultats scolaires et les relations; conflits répétés à la maison autour des écrans.
Repère clé : ce n’est pas qu’une question d’heures d’écran. On évalue surtout l’impact sur le fonctionnement et le bien-être. L’INSPQ (2024) rappelle d’ailleurs que la qualité du sommeil, la santé émotionnelle et le maintien des activités hors ligne sont de meilleurs indicateurs que le nombre d’heures d’écran.
Voici, ci-dessous, les principaux signes d’un usage problématique des réseaux sociaux chez les adolescents. S’ils apparaissent régulièrement, il peut être temps de consulter un professionnel :
10 signaux d’alerte à surveiller
- Difficulté à arrêter / promesses non tenues (“encore 5 minutes”).
- Sommeil écourté ou irrégulier (utilisation tardive, réveils nocturnes).
- Irritabilité, anxiété ou humeur basse en dehors des écrans.
- Retrait des activités sociales/sportives au profit du téléphone.
- Baisse de la concentration et des résultats scolaires.
- Mensonges, utilisation cachée, transgression des règles familiales.
- Hyperfocalisation sur l’image de soi, comparaison sociale douloureuse.
- Exposition à des contenus risqués (défis, sexualisation, désinformation).
- Cyberintimidation (victime ou auteur), conflits relationnels amplifiés en ligne.
- Poursuite de l’usage malgré des conséquences négatives répétées.
Ces signaux sont cohérents avec les constats du Surgeon General des États-Unis (2023), qui met en garde contre l’impact de l’usage intensif des réseaux sociaux sur la santé mentale des jeunes.
Astuce : notez sur 2 semaines les heures de coucher, les réveils nocturnes et l’énergie au réveil. Un simple journal de sommeil met souvent en évidence l’effet des écrans du soir.
Auto-évaluation rapide (ado & parent)
Répondez par Oui/Non :
- L’usage des réseaux perturbe-t-il mon sommeil ≥ 2 soirs/semaine ?
- Ai-je diminué des activités que j’aimais (sport, amis, loisirs) à cause du téléphone ?
- Ai-je de la difficulté à m’arrêter, même quand je me l’étais promis ?
- Y a-t-il plus de conflits à la maison autour des écrans depuis quelques mois ?
- Mon humeur, mon anxiété ou ma concentration se détériorent-elles ?
Stratégies familiales pour rééquilibrer
1) Co-construire des règles claires et visibles
- Moments d’usage (pas après l’heure de coucher, pas à table).
- Lieux sans écran (chambres, salle de bain, voiture pour trajets courts).
- Exceptions prévues (événement, fin de semaine) pour limiter les négociations.
2) Poser des garde-fous techniques
- Minuteurs d’apps, mode “pause” nocturne, filtres d’âge, “parking à téléphones”.
- Réveil non numérique pour éviter le téléphone dans la chambre.
3) Remettre du désir hors écran
- Planifier 2–3 activités attrayantes/semaine (sport, musique, amis, sorties).
- Projets concrets (cuisine, bricolage, bénévolat) pour nourrir l’estime.
4) Réguler le sommeil et la charge mentale
- Heure de coucher stable, routine apaisante, lumière tamisée 60–90 min avant dodo.
- Éviter le “scroll” au lit; chargeur hors de la chambre.
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Différencier “usage problématique” et “dépendance”
L’usage problématique décrit un ensemble de comportements qui nuisent au sommeil, aux apprentissages, à la santé émotionnelle ou aux relations. La dépendance (au sens clinique) implique un pattern persistant, une perte de contrôle et une détresse cliniquement significative, souvent avec des tentatives infructueuses de réduction et une poursuite malgré les conséquences. Dans le doute, mieux vaut intervenir tôt et progressivement.
Plusieurs organismes, dont la Société canadienne de pédiatrie (2023), soulignent qu’un usage problématique peut déjà nuire au développement même sans atteindre les critères cliniques de dépendance.
Point d’attention : le contenu consommé, la comparaison sociale, la cyberintimidation et l’usage tard le soir sont des facteurs clés d’escalade.
Comment la psychoéducation peut aider
Le rôle du psychoéducateur est d’évaluer le contexte (forces, risques, routines), d’outiller l’ado et les parents (habiletés d’autorégulation, communication, résolution de problèmes), puis d’accompagner la mise en place d’un plan d’intervention progressif. Selon les besoins, une psychothérapie peut être proposée.
Quand consulter ? Et quoi faire en urgence
Demandez un avis professionnel si l’usage nuit au sommeil, à l’école, aux relations, ou si la détresse augmente malgré vos essais d’ajustement. En cas d’urgence (idées suicidaires, mise en danger), contactez le 911 ou la Ligne d’aide en santé mentale 988 (Canada). Un psychoéducateur ou un psychologue peut vous guider rapidement.
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Ressources et services connexes
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Références
- American Psychological Association (2023). Health Advisory on Social Media Use in Adolescence. Lien
- Office of the U.S. Surgeon General (2023). Social Media and Youth Mental Health: Advisory. PDF
- Société canadienne de pédiatrie (2019/2023). Digital media / Social media and youth: A call to action. Healthy screen use · Position 2023
- INSPQ (2024). Usage des écrans, santé mentale et symptômes chez les jeunes. Synthèse · PDF
Ces références soutiennent les recommandations générales ci-dessus. Elles n’épuisent pas le sujet et ne remplacent pas une évaluation clinique individualisée.
Thinhinane Ould Younes, M. Pséd.
Psychoéducatrice, Vice-présidente de la Clinique PsychoÉducAction
Clinique PsychoÉducAction – Psychologie, psychoéducation et psychothérapie pour enfants, adolescents, adultes et familles à Montréal et sur la Rive-Sud.